S. Yizhar à Mishkenot Shaananim

Depuis quelques mois, Mishkenot Shaananim accueille “les vendredis littéraires”,  des livres et leurs auteurs mis en scène avec ce beau titre donnée à cette série, ” la littérature sur scène”.

Moments particuliers de ce Jérusalem littéraire, bouillon de culture, dans ces maisons datant du 19e siècle. Dans la Jérusalem ottomane, le richissime britannique Moshé Montefiore y avait abrité les juifs nécessiteux  qui avaient accepté de vivre en dehors des murailles protectrices.

Aujourd’hui rénovées, ces maisons ont été transformées  en bijou de l’architecture jérusalémite: pierres centenaires, jetées de bouquets fleuris sur les dalles d’époque, bois ancien et ferronnerie d’art, couleurs ocres, rouges et bleus. Mishkenot Shaananim est devenue une belle auberge pour artistes et écrivains ( Saul Bellow y a écrit son roman Le Don de Humboldt qui lui a valu le prix Pulitzer en 1975)  et plus récemment un centre de conférences et d’art.

 

Ce vendredi a été consacré à Yizhar Smilansky –  S. Yizhar – le plus grand écrivain israélien des débuts de l’Etat d’ Israël, pour beaucoup  fondateur de la littérature hébraïque. Yizhar est décédé à l’âge de 90 ans en août 2006. Le Larousse décrit ainsi ce  maître de la littérature israélienne des années 1940. (J’ai volontairement cité le Larousse pour vous permettre d’avoir accès aux titres des livres traduits en français)

” Son héros privilégié est un jeune homme rêveur et tourmenté comme lui, évoluant dans un paysage marqué par les souvenirs d’enfance d’un bourg agricole face aux espaces infinis du désert (le Bois sur la colline, 1947). Dans le roman les Jours de Tziklag (1957), ainsi que dans les Quatre Nouvelles (1956) et les Six Contes d’été (1960), il évoque le drame des combattants pour l’indépendance et leurs victimes, les conquêtes, la destruction et la mort. Avec les Contes de la plaine (1964), il est entré dans l’ère de la désillusion. Son style baroque, amalgamant le langage parlé à toutes les formes de l’hébreu, a profondément marqué la langue littéraire de ses contemporains. Après presque 30 ans, Yizhar brise son silence pour publier deux romans autobiographiques, où il retrace la saga des pionniers sionistes au début du XXe s, Miqdamot, 1992, et Zalhabim, 1993.”

S.Yizhar était un personnage complexe. Grandi dans une famille d’écrivains, professeur de littérature hébraïque à l’université de Tel-Aviv, il fut aussi député dès la première Knesset et jusqu’à 1967.  Il a beaucoup écrit sur la guerre, mais aussi sur la nature et l’écologie.

A Mishkenot Shaananim, S. Yizhar est joué sur scène. Théâtre, danse et mouvements  sur les questionnements de l’écrivain, questions qui avaient déjà dérangé au lendemain de la Guerre d’Indépendance et qui gardent aujourd’hui toutes leur acuité: la nature de la guerre, la désobéissance, la peur de mourir, le destin collectif face au cheminement de l’homme.  Décrivant les événements de la Guerre d’Indépendance, Yizhar avait écrit: ” N’était-ce pas notre privilège de vainqueurs ? Après deux mille ans d’exil et les persécutions en Europe, nous étions à présent les Maîtres. » « Il aimait les guerriers et détestait les guerres »  disait de lui le poète Haim Gouri.

Et un mot sur le public de Mishkenot Shaananim. Si différent des Tel-aviviens. Ces Jérusalémites du 21è siècle semblent dans leurs allures d’avant garde porter sur eux l’histoire millénaire de leur ville.